Quand tout va bien, assister ses collègues est un geste naturel. Mais dès que l'activité baisse et que l'ambiance se détériore, les gens se replient sur eux. Exit les coups de pouce, les renvois d'ascenseur, c'est chacun pour soi. La solidarité est rarement spontanée. Or c'est bien le rôle du manager d'instaurer un esprit de coopération véritable et durable dans l'équipe. Pour y parvenir, il a intérêt à s'appuyer sur les aidants et à se focaliser sur les égocentrés peu prompts à seconder leur prochain. Voici un processus en cinq étapes qui a fait ses preuves.
Les non-aidants tracent leur route. Ceux qui ont des points faibles pataugent en silence de peur d'être stigmatisés ou d'être jugés " nuls ". Il s'agit donc d'avoir du doigté pour rapprocher ces caractères sans braquer ni blesser personne. Ne les confrontez pas et procédez en deux temps.
1/ Parlez à tous en réunion pour délivrer un message fort : "Les résultats ne sont pas merveilleux, voilà le plan d'action que j'ai élaboré, j'aimerais que tout le monde s'entraide, c'est vital pour le service".
2/ Voyez en face à face les forte têtes : "Paul, j'ai besoin que tu passes un coup de main à Loïc, parce que tu as une vraie expérience du sujet avec un bel esprit de synthèse". L'idée est de rester positif afin de responsabiliser Paul et non pas de le culpabiliser sur son comportement égoïste ou indifférent.
3/ Faire comprendre à chacun que rien ne sert de "jouer perso" : dès que le collectif s'en sort bien l'individu s'en tire bien aussi alors que l'inverse n'est pas vrai. Cela donnera du sens à vos demandes.
De votre côté, choisissez la transparence. N'abusez pas de votre privilège de manager ayant accès aux instances supérieures et à leurs secrets. Communiquez et vulgarisez les éléments (non confidentiels) que vous avez sur la santé de l'entreprise, ses projets, les nominations, les réorganisations en cours, etc. Cela créera un climat de confiance et d'ouverture qui poussera l'équipe à échanger, à s'ouvrir à son tour. De même, lors des réunions du lundi, découragez les adeptes de la rétention d'information accros à ce petit pouvoir que cela donne sur les autres. Assurez-vous que tout le monde fait bien circuler son savoir, lequel peut faire gagner du temps ou éviter une erreur. Quitte à reprendre gentiment l'un ou l'autre. "Zoé, ne m'avais-tu pas dit que tu avais appris ceci auprès de notre fournisseur ?"
Un collaborateur patine ? Allez l'épauler si c'est dans votre champ de compétences même si celui-là n'est pas le plus fragile de la bande. Les patrons commerciaux font ainsi souvent des tournées auprès des clients avec leurs vendeurs qui sont à la peine sur leur chiffre d'affaires. Soyez disponible, accessible, restez empathique. Vous ferez ainsi preuve d'exemplarité. Résultats convaincants à l'appui, vous donnerez à vos troupes l'envie de vous imiter. Ceux qui jouent cavaliers seuls se sentiront gênés.
Avec les égocentrés ou les sceptiques, le binôme est une bonne façon de provoquer la coopération. Vous avez posé la règle de l'entraide en réunion (point 1) ? Vous allez donc un peu forcer la main au rétif Bruno pour qu'il parraine Luc, un maillon faible dans la réalisation du projet Z. Pour que ça marche, il faut que les deux profils soient complémentaires, que ce mentorat soit provisoire et assorti d'une feuille de route précise. A vous d'amadouer votre ingénieur. "Pendant trois mois, tu aideras Luc régulièrement car tu connais bien la boutique, je compte sur toi ". Après 15 jours réunissez le duo : "Où en êtes-vous ? J'ai constaté ceci, cela. Qu'en penses-tu Bruno ? Qu'en penses-tu Luc ?". Grâce à votre feed-back périodique, les choses avanceront, les liens se tisseront et soutenir son voisin deviendra un réflexe pour les protagonistes.
Il faut ensuite pérenniser ces nouvelles pratiques en valorisant l'effort effectué. Exécutez-vous à trois niveaux .
1/ Avec l'équipe, en réunion. "Il y a trois mois, je sollicitais un esprit d'entraide. Je tenais à tous vous remercier. Les objectifs sont atteints, les gens se sentent bien mieux et nous sommes plus efficients ensemble ."
2/ Avec les personnes en tête à tête. "Bravo, tu as bien su accompagner Luc. Grâce à toi on a pu sortir un projet nickel et dans les délais". 3/ En public, auprès de vos pairs, du n+1 et du DRH. "Nous avons opté pour davantage de solidarité. C'était top ! On a découvert que Bruno avait des talents de coach et que Zoé était une enquêtrice exceptionnelle". Des propos qui risquent fort de revenir aux oreilles des intéressés, ce qui boostera leur zèle.
Par Marie-Madeleine Sève pour L'Entreprise.com