En tant que manager par le passé et conseil en entreprise aujourd’hui, l’une des questions clés que je pose souvent à mes interlocuteurs, quand nous rentrons dans le détail de leur management au quotidien, est : « comment faites-vous la différence entre une faute et une erreur avec vos collaborateurs » ?
Les réponses les plus courantes sont :
« La faute est intentionnelle, l’erreur ne l’est pas »
« La faute est grave, l’erreur ne l’est pas »
Et d’autres propositions que je vous passe ici.
Pour interpeller mes interlocuteurs, je leur demande :
« Avez-vous fait breveter votre intentiomètre? » L’effet est toujours le même, des yeux grands ouverts qui me regardent avec incrédulité.
Si c’est l’intention qui permet de distinguer la faute de l’erreur, cela implique que nous savons la mesurer et comme un tel outil n’existe pas, ce n’est évidemment pas la bonne clé !
Une des grandes règles en management étant, selon moi, l’équité, chaque collaborateur doit se sentir manager par un chef juste et équitable.
Ensuite, concernant la gravité : comment distinguer ce qui est grave de ce qui ne l’est pas au quotidien ? Chacun de par son cadre de référence à son avis sur la question : ce qui est totalement subjectif et par essence, non équitable, donc qui ne peut être le critère pour différencier l’erreur de la faute.
La définition que je retiens : la faute est le non-respect d’une règle connue et l’erreur est un dysfonctionnement entre un objectif visé et le résultat final.
Si la faute doit être constatée, voire sanctionnée, l’erreur constitue une opportunité pédagogique qui permet à chaque collaborateur de gagner en compétences et en confiance en soi : l’erreur libère les énergies au niveau individuel et collectif.
A ce stade de mon exposé, j’imagine certaines réactions sur le thème : « c’est la culture de la médiocrité…».
Nullement !!! La vertu numéro 1 en entreprise est bien que chaque collaborateur soit dans les conditions optimales pour exécuter parfaitement ses tâches et réussir.
Cependant, le quotidien des entreprises montre bien que ses conditions optimales sont rarement réunies ou difficiles à réunir.
Libérer les énergies au niveau collectif, en faisant de l’erreur une vertu, permet de retirer la chape de plomb qui pèse sur une majorité d’entreprises.
De peur de commettre des erreurs et craignant la réaction de leur hiérarchie, les collaborateurs n’osent plus !
Des groupes de travail se réunissent pour décider de tout : comme, par exemple, de créer un groupe de travail pour décider de l’endroit où placer la fontaine à eau…
Chaque mail est envoyé à une foule de collaborateurs, y compris à certains qui sont peu ou pas du tout concerné par l’objet…
Certains font carrière sans prendre de décision, en se contentant d’avancer dans le sens du vent, à contrario, ceux qui prennent de décisions pour faire avancer les choses et donc potentiellement faire progresser l’entreprise, prennent le risque de commettre des erreurs et donc d’être mal jugés et de mettre à mal leur carrière…
En ayant une position claire et affirmée, nous libérons les énergies.
Si je sais, quand je commets une erreur dans mon domaine de résultats, que mon manager ne va pas me sermonner ou me sanctionner, ni dans son non-verbal, ni dans son verbal; je peux oser et prendre le risque de faire progresser l’entreprise.
Bien évidemment, une même erreur commise une seconde fois, devient une faute et doit donc être traitée comme telle.
Dans beaucoup d’entreprises, il est question de :
Pour cela, des boites à idées sont disséminées dans les locaux pour être facilement accessibles aux collaborateurs : ces boites restent souvent désespérément vides !
Les collaborateurs ne sont pas dupes, ils sont conscients que c’est, à minima pour le principe, ou au plus une attente de la direction d’obtenir l’idée du siècle qui transformera favorablement son business.
Combien d’inventeurs, et surtout de chefs d’entreprises, au moment où ils ont eu une idée, savaient à coup sûr que leur idée allait révolutionner le quotidien des utilisateurs ?
Très peu.
En faisant de l’erreur une vertu : c’est-à-dire à chaque fois qu’une erreur est commise par une personne, plutôt que de rechercher le ou les coupables ; se concentrer sur comment éviter cette erreur à l’avenir.
Au niveau individuel : permettre de développer la confiance en soi, le bien être, l’estime de soi
En entreprise, dans les réunions ou les groupes de travail; ce sont toujours les mêmes personnes qui s’expriment : généralement, des collaborateurs qui ont énormément confiance en eux, qui sont d’ailleurs, pour ainsi dire, dans l’affirmation de soi.
Au sein d’un groupe, leur priorité c’est de montrer qu’ils sont là, qu’ils existent.
On trouve parmi eux :
Ceux qui ont suivi des parcours universitaires de haut niveau, parcours au cours duquel année après année leur cadre de référence leur a permis de construire leur confiance en eux.
En leur disant régulièrement : « Vous êtes les meilleurs, l’élite du pays »
Certaines personnes, même si cela cache d’autres choses plus personnelles, ne peuvent s’empêcher de donner leur opinion sur tout.
A côté de ces personnalités, il y a beaucoup de collaborateurs qui ont beaucoup moins confiance en eux : commettre une erreur pour eux n’est juste pas acceptable, et d’ailleurs, cela ne ferait qu’aggraver leur manque de confiance en eux.
De fait, ils n’osent pas, ne prennent pas la parole, ne proposent rien de peur de s’entendre dire : erreur, mauvaise idée, etc.
Or, dans le contexte de transformation dans lequel se situent la grande majorité des entreprises actuellement, la bonne idée qui va permettre d’adapter le business model aux attentes nouvelles des consommateurs, la bonne organisation qui va permettre de gagner en efficience et rester compétitif, le bon process qui va permettre d’être plus proche du client, ne viennent plus seulement de la direction, ni des plus diplômés, et encore moins de ceux qui parlent le plus et le plus fort.
En dédramatisant la notion d’erreur, en encourageant la prise d’initiatives et donc en acceptant la possibilité de l’erreur (sans la souhaiter), on invite plus de personnes à la « la table » des actions.
Cela dit, tout le monde ne viendra pas autour de la table car certains collaborateurs ont comme moteurs « Soit parfait » ou encore « Soit fort » qui leur interdisent donc de prendre des initiatives qui constituent alors un risque majeur pour eux.
Ceux-là, c’est une histoire qui vient de trop loin pour qu’une culture d’entreprise ou un manager puisse les mettre facilement en action.
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