Dans un contexte de crise, les entreprises ont-elles intérêt à renforcer leur politique de gestion des talents ?
En période de récession économique, le premier réflexe est de réduire les investissements en gestion des ressources humaines. Mais certaines entreprises ont compris que c’est davantage leur manière de recruter qui doit aujourd’hui évoluer. Comment ? D’abord en travaillant sur le réseautage en interne (à travers notamment la cooptation), puis en promouvant les talents à la fois en interne (networking, fédération des services, évènements internes…) et en externe (via différents supports comme les sites carrière ou des évènements rassemblant des jeunes et des entreprises). Enfin, il s’agit de développer les relations avec les écoles. En Inde, les grandes entreprises travaillent sur le programme de formation des universités pour assurer à 3, 5 et 7 ans la réponse à leurs pénuries futures.
Comment, en période de crise, les RH peuvent-ils convaincre leur direction d’investir dans ce domaine ?
Aujourd’hui, le RH est un business partner plus qu’une fonction support. La gestion des talents n’est plus centrée uniquement sur les cadres supérieurs mais également sur les fonctions de middle management. Les RH apportent une réelle valeur ajoutée en mettant en œuvre une politique de gestion des talents en phase avec la stratégie à moyen et long terme de l’entreprise. De plus, le RH peut mesurer le retour sur investissement de cette politique de gestion des talents en vérifiant des éléments tels que la qualité des candidatures soumises, le nombre de postes pourvus, le temps passé dans l’entreprise, la manière dont ils évoluent. Ce ROI peut être mesuré par les résultats financiers auxquels les candidats recrutés ont pu contribuer (résultats commerciaux, chiffres d’affaires…).
Les jeunes sont fortement touchés par le chômage. Est-ce une fatalité ?
C’est en tout cas une réalité vécue en Europe et dans les pays émergents, comme le démontre notre index mondial des compétences, réalisé avec Oxford Economics. Jusqu’au Brésil, qui connaît une forte croissance économique, il est possible de constater une inadéquation flagrante entre les compétences demandées par les recruteurs et les profils des candidats. En matière d’employabilité des jeunes, des politiques conjointes doivent être menées entre les gouvernements, les entreprises et les universités, pour faire correspondre les formations aux attentes du marché de l’emploi. En France, on attache souvent beaucoup trop d’importance au diplôme, notamment pour les profils jeunes diplômés. Le cabinet Hays essaie justement de provoquer un changement culturel chez ses clients, qui sont encore trop souvent à la recherche de talents pour répondre à un besoin court-termiste. Ce changement culturel passe notamment par le développement de relations avec les campus managers pour encourager des stages de longue durée ou des premiers emplois. Relations pratiquées uniquement par les très grandes entreprises françaises et qui doivent se généraliser.
Les RH doivent-ils forcément s’emparer de la question des réseaux sociaux ?
Quelques 6 étudiants sur 10 pensent que la société qu’ils vont rejoindre possède automatiquement un compte Facebook ou Twitter. Leur culture de recherche d’emploi est donc forcément liée aux réseaux sociaux. D’ici 7 ans, nos études montrent que 40 % des recrutements passeront par ces médias. Je pense que les RH auront beaucoup plus de crédibilité s’ils arrivent à déployer leur vision avec les nouvelles techniques de recrutement issues des médias sociaux.
Propos recueillis par Romain Giry
Extrait de l'excellent site FOCUS RH